Choix

Publié le par Bidou

On entend parfois dire que le développement durable s’impose parce que nous n’avons pas le choix. La planète est à bout de souffle, nous sommes dos au mur. Quelle tristesse ! Nous serions condamnés au développement durable. Comme si le développement durable était une punition, un mal nécessaire. Nous savons dans ce blog que c’est tout l’inverse, le développement durable est la découverte active d’un autre monde, qui doit nous mobiliser dans une recherche de plaisir.

Il arrive dans la vie que l’on n’ait pas le choix. Prenez ce que nous appelons les inégalités écologiques. Elles se superposent souvent, et aggravent, les inégalités sociales. C’est tout simplement que lorsqu’on a le choix de quitter un secteur dégradé, on va ailleurs, ne laissant sur place que les plus pauvres, qui n’ont pas le choix. Un phénomène tout bête de sélection naturelle. Lutter contre les inégalités écologiques, c’est réduire et éliminer les facteurs de dégradation, points noirs du bruit, sources de pollutions de l’air et de l’eau, paysages défoncés ou aseptisés.

Ne serait-ce pas le même phénomène que l’on trouve pour la finance, dont on parle beaucoup aujourd’hui ? Quand les capitaux[1] sont trop taxés, ou quand les riches sont trop taxés, ils vont ailleurs. Ça commence ici, chez nous, avec la fiscalité locale. La concurrence est rude pour attirer les entreprises et les taxes qui vont avec. La mondialisation donne au phénomène une dimension nouvelle. Très schématiquement, le capital est mobile, il a le choix, le travail[2] est fixe. La répartition des fruits de la croissance en est affectée : il faut maintenir ou attirer le capital, c’est la priorité. On n’a pas le choix ! Se crée ainsi un sentiment d’injustice, peu propice à l’innovation et à le recherche collective de nouveaux équilibres, de nouvelles organisations de nos sociétés nécessaires pour relever les défis qui nous attendent : atteindre de très hauts niveaux de performance dans l’usage des ressources naturelles, cultiver le dynamisme et la créativité de populations malgré leur vieillissement, réduire les formidables inégalités qui se sont interposées entre le Nord et le Sud.

Il faut donc se donner les moyens d’avoir le choix. Sortir des contradictions par le haut. Si la main d’œuvre est plus chère chez nous, et même beaucoup plus chère que dans certains pays d’Asie par exemple, il faut que ça soit en contrepartie d’un intérêt véritable pour l’entreprise. C’est sur ce point qu’il faut concentrer les efforts. Comment renforcer notre apport spécifique. A l’inverse, lutter en essayant de réduire les charges salariales, c’est affronter les autres sur leur terrain, perdre tout espoir d’apporter un plus original qui ferait notre différence, notre valeur[3] ajoutée, et tirerait la production mondiale vers de nouveaux produits, ceux de demain, ceux du développement durable.

Le caractère nomade du capital par rapport au côté sédentaire du travail, approximation toujours bien grossière, nous l’avons compris, nous pousse au dépassement[4] de soi. Le train-train nous entraînerait dans une concurrence dont nous sortirions affaiblis, divisés et vidés de toute créativité. Il faut se défoncer, pour justifier la valeur du travail dans nos sociétés. Le haut niveau de vie et de protection sociale que l’on y trouve ne doit pas être porté au passif de notre compétitivité. Il offre aussi des avantages qui doivent être portés à l’actif en terme de capacité à innover, à anticiper, à prendre les bons risques[5], à comprendre l’évolution du monde dès les premiers signes.

Le choix est donc de se donner les moyens d’avoir le choix, ou d’abandonner tout espoir de se distinguer, de jouer un rôle particulier et valorisant parmi les peuples de la planète.

L’accent mis sur la maîtrise des coûts salariaux est trompeur. Il n’y a rien à gagner sur ce terrain, ni pour nous-mêmes ni pour les autres peuples qui cherchent à atteindre des niveaux de vie convenables. C’est sur la créativité qu’il faut miser, une créativité qui doit être attisée par les enjeux du développement durable. Une nouvelle économie est à construire, Bretton Woods est à refaire, nous passons du monde infini au monde fini, avec de nouvelles règles économiques et sociales à inventer. C’est là qu’il faut trouver notre valeur ajoutée, c’est notre choix, le choix du développement durable.


Prochaine chronique : Cabine

[1] Capital, chronique du 22/02/2007

[2] Travail (01/05/2006 n°77 dans Coup de shampoing sur le développement durable, www.ibispress.com )

[3] Valeur (11/09/2008)

[4] Voir Dépasser (18/06/2006 et    n°19 dans Coup de shampoing)

[5] Risque (26/06/2006 et n°64 dans Coup de shampoing)

Publié dans developpement-durable

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J
pourquoi ne pas décliner patron :patronnage, patronner ...certains ont meme cru astucieux de parler d'ethique des affaires laquelle affaire et pour qui? la morale :arretons !a bonne gouvernance c'est responsabilité ,droits et devoirs ,solidarité et équité
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